Nos chroniques
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Quand la campagne invite la ville au rodéo
C'était en 2015 la 76ème année que l'association Sioux Empire Fair organisait la rencontre de la ville et de la campagne à Sioux Falls. Nous nous y rendîmes pour assister à notre premier rodéo et nous y trouvâmes beaucoup plus.
Arrivés à pied du camping, nous traversons l'immense parc automobile des visiteurs; avec ceux des exposants et des animateurs de la fête ainsi que le camping et les parc des bestiaux et des chevaux du rodéo, ils forment une ceinture qui entoure la manifestation. Ca arrive et ça part. Trois jeunes gens debout devant une guérite provisoire nous vendent une entrée valable pour tous les événements de la journée, y compris le rodéo. Une seconde, sensiblement plus chère, est requise pour accéder au parc qui réunit plus d'une vingtaine d'attractions. Les lumières des plus grandes signalent la manifestations à plusieurs kilomètres.
Tous les animaux de la ferme ou de compagnie sont exposés. Les enfants peuvent entrer dans des enclos pour caresser alpagas, chèvres, cochons, moutons, veaux, etc. Une cinquantaine de personnes sont assises devant une grande vitrine à l'intérieur de laquelle est présentée une vraie salle de traite. Une vache Simmental, dont la mamelle pleine de lait impressionne, attend de passer en vitrine. Des truies somnolent en grognant dans le dernier modèle de caisson leur permettant d'allaiter leur progéniture d'un ou deux jours. Une paysanne endimanchée met les porcelets dans les bras des enfants qui jubilent. Contre les murs, des films didactiques du travail à la ferme ou dans les champs sont projetés sur de grands écrans. Dehors, d'anciens tracteurs paraissent tout petits à côté des monstres actuels.
D'autres halles présentent de l'artisanat ou abritent des vendeurs de toute sorte, savons, billets de loterie, véhicules de loisir, prédictions de l'avenir, habillement, cabanes de jardin, casseroles magiques et j'en passe…
S'agissant de la nourriture, les alignements de nourriture à l'américaine sont innombrables; mais pas de petits restaurants ou de stands mettant en valeur une cuisine plus saine que celle qui fabrique une population en surpoids très, voire trop nombreuse. Il faut se rendre dans les supermarchés pour trouver les produits frais de l'agriculture et de la pêcherie américaines, y compris biologiques. Les grands magasins présentent volontiers leurs fournisseurs locaux avec les noms des exploitants et des photos. On retrouve les noms sur les étiquettes. Mais la plus grande partie de la production agricole est assurée dans des fermes où le mot d'ordre est la rationalisation. Tout est immense, tout est automatisé, tout est mécanisé, les publicités pour les engrais, pour les pesticides et pour les semences animales ou végétales génétiquement manipulées bordent les routes et les champs. Les fermes dite de finissage des animaux de boucherie offrent un spectacle désolant. J'imagine que la gestion financière est aussi très complexe. Les investissements sont en tous cas considérables et, outre l'incertitude climatique, le marché agricole est très concurrentiel. Cette agriculture-là, et les modes alimentaires qu'elle suppose, n'appartient pas aux multiples points positifs déjà comptabilisés aux Etats-Unis, y compris dans la protection de l'environnement et de la santé des personnes.
Bref, revenons à notre rodéo. Il doit commencer dans une heure, nous avons juste le temps de nous arrêter quelques minutes devant un dresseur de chiens et de passer voir les épreuves de dressage équestre. Il s'agit de monte à l'américaine, selle, bride et tenues de circonstance. La cavalière, la plupart du temps ce sont des "cowgirls", ne tient les rennes que d'une main et conduit sa monture en déplaçant beaucoup le corps. Les programmes sont courts et se déroulent dans un ambiance très calme.
Nous arrivons au pied du grand stade où a lieu le rodéo. Plusieurs milliers de personnes y assisteront. Des camions déchargent des broncos et des taureaux aux deux extrémités de l'arène et un animateur a commencé à chauffer l'assistance en faisant le clown. De la musique country se fait entendre.
A l'époque où j'étais aux manettes de Fête la Terre, l'invitation annuelle de la ville à la campagne dans la région de Suisse d'où nous venons, le vétérinaire cantonal m'avait fait savoir qu'il ne m'autoriserait jamais à organiser un rodéo. Raison invoquée: le traitement infligé aux chevaux en leur sanglant les parties arrières tient de la torture. Plusieurs centaines de rodéos ont lieu chaque année dans tous les états des USA sans que ni les vétérinaires des administrations, ni les organisations de défense des animaux ne s'y opposent. Je me suis installé de telle sorte que je puisse observer de manière rapprochée la préparation des épreuves et le comportement des animaux en attente d'entrer dans l'arène ou au retour de leur exhibition. Outre l'intérêt d'assister une fois de près à un rodéo, je voulais savoir de quelle torture le vétérinaire cantonal m'avait parlé.
Alors, il est vrai qu'une sangle ventrale est tendue sur les parties arrières du cheval au moment de le lâcher avec son cavalier dans l'arène. Le cheval bondit dans tous les sens pour s'en défaire, elle le dérange de toute évidence énormément. Aussitôt que le cavalier a été éjecté de sa monture ou qu'il a pu se hisser sur le dos d'un des deux autres chevaux montés, présents dans l'arène, le cavalier de l'autre cheval s'approche à toute vitesse du bronco et détache cette sangle, soit-disant de torture. Le bronco se calme aussitôt, parfois même avant, et il se laisse approcher et conduire dans l'enclos sans s'énerver et sans donner l'impression de souffrir d'aucune manière. Connaissant un peu la facilité avec laquelle les chevaux paniquent, c'est notamment pourquoi ils s'emballent parfois, et en ayant déjà vu transpirant, essoufflés, parfois même au stade de faire un coup de sang,.je n'assimile pas à de la torture le traitement infligés aux broncos de rodéos. Je crois que les chevaux de course ou de concours hippiques de haut niveau, voyageant pour d'aucuns en avion sur les cinq continents, connaissent un sort beaucoup moins enviable que les broncos de rodéos. Dommage pour Fête la Terre, le spectacle du bronc ou du bull riding (essayer de se tenir le plus longtemps possible sur un cheval sauvage ou sur un taureau), du barrel racing (course de vitesse autour de tonneaux), du roping (prise d'un taurillon au lasso) ou encore du steer wrestling (coucher un jeune taureau en l'empoignant par les cornes) est de toute beauté. La souplesse et la vitesse des chevaux ainsi que les prouesses des cowboys offrent un spectacle certes à l'américaine; mais très authentique et loin des grandes productions truquées d'Hollywood et de Las Vegas.
Nous rentrerons éblouis par cette fête bondée, mais se déroulant tout en décontraction, avec des forces de l'ordre du shérif et du FBI bon enfant. Pas d'excès d'alcool ou d'autres substances psychotropes à signaler, nous n'étions pas en terre viticole.
RT, à suivre…
09.08.15
Up Jumped the Devil